Des traces de pesticides et de contaminants chimiques ont été relevées dans des ananas vendus en vrac dans les magasins français… Une nouvelle affligeante qui porte un coup certain au label Bénin. Et puisque qu’un malheur ne vient jamais seul, le moment est propice pour se poser les bonnes questions.
Avant l’expédition, il convient de s’intéresser à notre assiette, à la consommation locale. Quel contrôle? Si la France n’a pas fait ce pas, on n’en saurait rien ? Est-ce à dire que le consommateur béninois ne dispose d’aucun droit? L’usage des pesticides vendus aux producteurs ne devrait-il pas encore être mieux encadré ? A quoi servent nos laboratoires créés de part et d’autre ? Tant les taux de cancers, d’insuffisances rénales et de maladies cardiovasculaires sont trop élevés surtout dans la tranche des 35 – 45 ans. Au vu du nombre croissant des dyalisés qui se retrouvent généralement dans l’incapacité de suivre les soins, faute de moyens, on peut conclure, sous réserve d’une étude scientifique plus approfondie que les pouvoirs publics se doivent d’instruire, que nous nous tuons à petit feu sous le regard coupable et complice de l’Etat qui ne fait pas assez pour sécuriser les produits de consommation fermiers (fruits et légumes, viandes et poissons, œufs, produits laitiers, miel…) .
Les sources d’exposition aux pesticides de la population en générale, au-delà des champs se retrouvent dans tous les compartiments de l’environnement : l’eau de consommation ; l’air intérieur et extérieur; les sols; les poussières à l’intérieur de la maison ; l’utilisation domestique des pesticides, notamment dans les jardins ou sur les animaux domestiques.
En juin 2013, l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale, France) a rendu publics les résultats d’une étude réalisée par un groupe d’épidémiologistes qui a fait la recension des écrits scientifiques concernant les effets des pesticides sur la santé. Selon ce groupe d’experts, il existe une association positive entre l’exposition (surtout professionnelle) à ces produits et certains cancers et la maladie de Parkinson. De plus, les pesticides sont susceptibles d’avoir un effet délétère sur le développement de l’enfant durant la grossesse ainsi que pendant la petite enfance. En milieu professionnel, la voie cutanée est la principale voie d’exposition, la voie respiratoire pouvant être impliquée lors de circonstances particulières, comme lors de fumigation ou à la suite la manipulation des pesticides en milieu fermé. En ce qui concerne la population générale, l’ingestion constitue la principale voie d’exposition.
L’étude de l’INSERM révèle que le cancer de la prostate, des cancers hématopoïétiques (lymphomes non hodgkiniens et myélomes multiples) et la leucémie sont susceptibles d’être engendrés par les pesticides. Dans le cas du cancer de la prostate, une augmentation du risque existe chez les agriculteurs, les ouvriers de production/manipulation de pesticides ainsi que chez les populations rurales exposées. Une augmentation du risque de leucémie est rapportée par plusieurs études, en lien avec de nombreux groupes de pesticides, notamment les organochlorés et les organophosphorés; le lien statistique est toutefois plus ténu qu’avec les autres cancers cités précédemment.
Sur un autre tableau, ce collège de scientifiques note une augmentation du risque de développer la maladie de Parkinson chez les personnes professionnellement exposées, plus spécifiquement aux insecticides et aux herbicides. Des associations avec d’autres maladies neurodégénératives sont moins évidentes, bien qu’un lien puisse exister avec la maladie d’Alzheimer. Par ailleurs, une augmentation significative du risque de mortalités fœtales et de malformations congénitales a été mise en évidence suite à une exposition professionnelle maternelle aux pesticides. En ce qui concerne la population générale, plusieurs études cas-témoins et de cohortes montrent une augmentation du risque de malformations congénitales chez les enfants de femmes vivant au voisinage d’une zone agricole ou suite à un usage de pesticides domestiques.
Dans un pays comme le Bénin dont la population agricole tourne autour de 35,8%, selon INStaD, la course effrénée à une production rentière accrue, les expositions alimentaires (denrées alimentaires et eau distribuée) devraient être, aujourd’hui, incontestablement la voie d’exposition de la population. Hélas ! L’utilisation abusive, sans contrôle et sans normes des pesticides au Bénin est sans nul doute un réel problème de santé publique. L’Agence béninoise de la sécurité sanitaire des aliments (Abssa) doit jouer en toute responsabilité et avec une conscience plus accrue son rôle de structure avant-gardiste car les sols, les eaux, les insectes, les animaux, les plantes, l’air et l’Homme (qui est en perpétuelle interaction avec tout ceci) sont dans une dégénérescence évolutive. L’extinction progressive des espèces naturelles et du déséquilibre de l’écosystème en général par les pesticides inaugure une nouvelle ère de l’histoire de l’humanité : quel monde laisseront nous aux générations futures ? Là est toute la question !
Irédé David R. KABA / Contact : 95795555