PROGRAMME NATIONAL D’ALIMENTATION SCOLAIRE INTÉGRÉ: Une opportunité de marchés d’écoulement pour les producteurs locaux

Au Bénin, le gouvernement a lancé en 2017 le Programme National d’Alimentation Scolaire Intégré (Pnasi). L’initiative vise à réduire la faim chez les écoliers et à les maintenir à l’école, grâce à une approche multisectorielle, en privilégiant les achats locaux. Cette façon de faire conduit à l’amélioration des performances scolaires, la diversité alimentaire et la nutrition des élèves. Avec l’appui du Programme Alimentaire Mondial (Pam) et sous la coordination de l’Agence Nationale de l’Alimentation et de la Nutrition (Anan), le programme favorise l’approvisionnement des cantines scolaires en produits vivriers, maraîchers et transformés fournis par les producteurs et groupements locaux. Ce lien direct entre productions agricoles locales et alimentation scolaire contribue non seulement à renforcer à la fois la scolarisation et la nutrition des enfants mais favorise aussi la vente sur place des productions locales.
Le Pnasi a permis de faire passer le taux de couverture des écoles en cantines de 31 % en 2017 à plus de 75 % en 2024, touchant plus d’1,4 million d’élèves. Les retombées sont visibles : hausse des inscriptions, réduction des abandons scolaires, amélioration de l’état nutritionnel des enfants, mais aussi autonomisation économique et résilience communautaire. De 2025 à 2027, le programme entend renforcer ses actions dans les communes de Tanguiéta, Matéri, Malanville, Ségbana et Banikoara, en intégrant des pratiques agricoles durables, la formation des groupements féminins de transformation et l’introduction de cantines « vertes » dotées de technologies de cuisson économes en énergie.
Un partenariat gagnant avec les producteurs locaux
En reliant l’exploitation agricole aux cantines scolaires, le Pnasi a instauré un cercle vertueux : les enfants accèdent à des repas nutritifs et variés, tandis que les producteurs disposent enfin de débouchés sûrs et réguliers. À Toviklin par exemple, les premiers stocks ont déjà été livrés aux cantines pour l’année scolaire 2025-2026. « Les vivres sont disponibles et nous avons commencé les sensibilisations auprès des parents pour les souscriptions volontaires », explique Judith Kouessivi, point focal nutrition et chaîne de valeur du Pam.
À Lalo, les maraîchers de la coopérative Missogbé d’Ahomandégbé livrent désormais crincrin, amarante, grande morelle, chou et carottes aux écoles. « C’est la première fois que nous livrons aux cantines grâce au Pnasi. Avant, nous produisions sans trouver de preneurs. Aujourd’hui, nous avons un marché sûr et nous livrons chaque semaine », confie Vlavo Isidore, technicien de la coopérative. Outre les légumes, les cantines reçoivent du gari des coopératives Nougnon et Edjouagnon, des œufs frais fournis par Radd Ong et d’autres produits maraîchers issus des coopératives Edjouafon et Senava.
Dans la commune de Djidja, producteurs locaux et femmes transformatrices approvisionnent les cantines en riz étuvé, gari, légumes et œufs. À la ferme pédagogique Zitti, située à 30 km de Djidja, la secrétaire Toyou Sandrine se réjouit : « Au cours de l’année scolaire écoulée, nous avons livré près de 95 kg de légumes et de feuilles locales (carottes, gboman, tchayo, crincrin), ainsi que des œufs. Nous voulons encore plus d’écoles pour écouler nos produits », affirme-t-elle, en montrant les jardins déjà prêts pour de nouvelles livraisons. Les femmes transformatrices jouent aussi un rôle majeur. Le groupement féminin La Gloire du Christ, spécialisé dans l’étuvage du riz, a livré plus de 10 tonnes de riz étuvé non poli durant toute l’année scolaire 2024-2025, générant plus de cinq millions de francs CFA. « Grâce au Pnasi, nous sommes épanouies. Nous vendons en gros et nous avons trouvé un bon marché », se félicite sa présidente, Firmine Agoligan.
Pour Estelle Rosalia Tchoumado, point focal nutrition et chaîne de valeur du projet à Djidja, ces partenariats sont essentiels : « Le gari est une source d’énergie importante dans l’alimentation des enfants. Nous l’utilisons avec le maïs et le riz, les trois principales sources d’énergie de leur panier alimentaire. Le gari sert à préparer le èba (piron), le gari gnignan, ou encore accompagne le niébé cuit consommé régulièrement ».
En valorisant la chaîne locale d’approvisionnement et en garantissant des repas équilibrés aux élèves, le Pnasi agit à double niveau : il dynamise l’économie locale et améliore la qualité des cantines scolaires. Une initiative qui profite à la fois aux producteurs locaux et aux apprenants, tout en contribuant à la résilience des communautés.
Moudachirou ALIOU