POLITIQUE DE SÉDENTARISATION DES ÉLEVEURS AU BÉNIN : Stabiliser pour mieux cohabiter…

Face aux conflits récurrents entre agriculteurs et éleveurs, le Bénin a engagé une politique ambitieuse de sédentarisation de l’élevage. L’objectif est de fixer les éleveurs dans des zones aménagées, tout en favorisant une cohabitation pacifique avec les agriculteurs. Adamou Mama Sambo, Haut-Commissaire à la sédentarisation des éleveurs, revient sur les enjeux, les mesures concrètes et les défis de cette réforme dans un entretien accordé à radio Fraternité de Parakou.
Journaliste : Quelle est la finalité de la politique de sédentarisation mise en œuvre au Bénin ?
Adamou Mama Sambo : Cette politique répond à un double impératif moderniser l’élevage béninois et instaurer une coexistence pacifique entre éleveurs et agriculteurs. Le but est de stabiliser les éleveurs dans des zones définies, avec des infrastructures adaptées comme des points d’eau et des parcs de vaccination. Il s’agit aussi de professionnaliser l’activité pastorale et de réduire les déplacements incontrôlés du bétail, sources fréquentes de conflits.
Comment la sédentarisation prend-t-elle forme concrètement sur le terrain ?
Nous avons instauré des cellules locales dans les communes, avec la participation des maires, préfets et autorités décentralisées. Ces cellules identifient des zones d’exploitation pastorale dans les plans d’aménagement communaux. En parallèle, des décrets réglementent désormais la mobilité des troupeaux, autrefois libre. Aujourd’hui, la transhumance est gérée à l’échelle départementale, sous la coordination des préfets.
Quelles mesures encadrent les déplacements des animaux entre communes ?
Un certificat national de transhumance a été instauré. Il oblige les éleveurs à déclarer leur déplacement auprès de la commune de départ et de la commune d’arrivée, qui vérifient la capacité d’accueil. Cette réglementation vise à éviter la surpopulation animale et les dégâts aux cultures, et ainsi prévenir les conflits.
Quelles actions sont menées pour apaiser les relations entre éleveurs et agriculteurs ?
Un comité multi-acteurs réunit éleveurs, agriculteurs, élus locaux et autorités administratives. Ce comité veille au respect des règles, facilite le dialogue et la résolution des conflits. Nous avons aussi mis en place des comités de concertation pour la cohésion sociale, qui accompagnent les maires dans la mise en œuvre d’infrastructures et la négociation entre parties.
Quels sont les principaux défis rencontrés dans la mise en œuvre de cette politique ?
Changer les habitudes anciennes n’est pas simple. Il faut beaucoup de sensibilisation et d’accompagnement, notamment auprès des services techniques et des collectivités. Par ailleurs, il est essentiel d’assurer un aménagement suffisant des zones pastorales pour accueillir durablement les troupeaux. Enfin, il faut garantir la rigueur dans l’application des règles de mobilité.
Quel message souhaitez-vous adresser aux acteurs ruraux concernés ?
La sédentarisation n’est pas un frein à l’élevage, mais un moyen d’améliorer la reconnaissance officielle de l’activité, d’accroître la productivité et surtout d’assurer la paix entre communautés. Si chacun respecte les règles, éleveurs et agriculteurs peuvent bâtir ensemble un environnement rural plus stable, prospère et pacifique.
Source: Radio Fraternité FM