DÉVELOPPEMENT DES FILIÈRE SOJA ET CAJOU : une industrialisation qui asphyxie les producteurs?

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Dans une intervention lors d’un débat politique sur le plateau Reporter Media Monde , le Dr Adam Sounon Konde dénonce les politiques agricoles mises en œuvre par le gouvernement du Bénin, en particulier dans le développement des filières soja et cajou. À travers des chiffres et des observations de terrain, il met en lumière ce qu’il considère être une stratégie défavorable aux producteurs locaux et un modèle d’industrialisation qui profite peu à l’économie paysanne.

Dr Konde souligne un bouleversement dans les contributions des principales filières agricoles à la valeur totale des exportations. Jusqu’en 2022, le coton dominait largement avec 86 % de cette valeur. Cependant, cette part a chuté à 66 % en 2023, soit une perte de 20 points de pourcentage. Pendant ce temps, le cajou a vu sa contribution passer de 4 % à 14 %, tandis que le soja est passé de 1 % à 12 %. Cette transformation, loin d’être une preuve d’une industrialisation réussie selon lui, dissimulerait des pratiques nuisibles aux producteurs. Dr Konde affirme « C’est une politique apparemment qu’on cache derrière une pseudo-industrialisation… L’exportation est interdite, mais les produits sont réembarqués. » L’auteur critique l’installation d’usines de transformation qui, selon lui, restent incapables d’absorber la production nationale. Il déclare : « Sur le site de Glo-Djigbé, ils disent avoir implanté une usine avec une capacité de transformation de 1 % ou 2 % de leur production. »
Le reste de la production, malgré les interdictions d’exportation, serait « récupéré » par le système étatique pour être vendu à des entreprises privées. Cela priverait les producteurs de leur autonomie économique.
Dr Konde se demande alors pourquoi ces mêmes producteurs ne peuvent pas profiter directement du marché d’exportation: « Pourquoi dire que le soja ne doit pas sortir alors qu’on n’est pas capable de tout transformer ? »
Dr Konde insiste sur l’impact économique direct de ces politiques sur les producteurs. Il pointe l’endettement croissant et l’exil forcé de certains producteurs très endettés : « Aujourd’hui, on voit des exilés producteurs… Ils quittent le pays sous le poids de la dette. »
Il remet également en question l’amélioration de la qualité de vie des agriculteurs, affirmant que ces politiques « appauvrissent les producteurs au lieu d’améliorer leurs revenus. »
Face à ces constats, Dr Konde propose un changement de paradigme. Premièrement, il suggère de libérer les marchés d’exportation pour les produits excédentaires tels que le soja et le cajou. Ensuite, il appelle à garantir des prix de vente supérieurs au coût de revient, grâce à des mécanismes de régulation comme la subvention ou la stabilisation des prix, qui existaient par le passé. Enfin, il prône une industrialisation locale équitable, en affirmant que : « Il faut favoriser le privé, mais pas au prix des producteurs. »
Dr Adam Sounon Konde appelle à une révision des politiques agricoles du Bénin pour permettre aux producteurs de tirer pleinement profit de leurs efforts. Il dénonce une industrialisation qu’il juge inefficace et demande que le Bénin appartienne véritablement aux Béninois, notamment aux producteurs qui sont les piliers de l’économie agricole. Cette critique politique qui invite à repenser le modèle actuel en faveur d’un système qui valorise davantage les filières et améliore réellement la vie des agriculteurs tend à faire croire que le gouvernement les asphixie…

Nadjahatou BAGUIRI

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