Déjà fin octobre, mais des pluies continuent d’arroser les champs
C’est normalement le temps des récoltes, mais les agriculteurs continuent de contempler leur labeur ne sachant comment faire.
Les différentes cultures durement produites sont prêtes à quitter les champs pour les marchés, mais les pluies diluviennes continuent d’arroser les champs. Face au désarroi, les agriculteurs s’inquiètent du sort de leur production contrainte aux caprices de la nature. Malgré eux, ils subissent, impuissants, les effets des changements climatiques.
Ces changements hypothèquent le développement de l’agriculture qui reste de type pluvial et donc rend vulnérables les producteurs agricoles surtout dans un pays comme le Bénin où l’agriculture est un secteur pourvoyeur de l’économie nationale et une garantie des ruraux.
Au Bénin, l’économie est essentiellement tournée vers le secteur agricole, à laquelle elle contribue à plus de 37 % du Produit Intérieur Brut (PIB), 40 % des recettes d’exportation et emploi 70 % de la population active.
Dès lors, toute activité d’appui à l’adaptation de l’agriculture face aux aléas climatiques s’avère nécessaire afin de mettre à disposer des producteurs des moyens et ressources qui les aideront à s’adapter aux changements climatiques qui handicape le secteur agricole.
Changement climatique et agriculture au Bénin
Le Bénin a connu des périodes de sécheresse dont les plus marquants sont celles des années 1976-1977, 1983, 1992, qui ont provoqué des situations de famine. Par contre, dans les années 1988, 1998, 2010, 2012… ont été enregistré dans bon nombre de localité, les plus forts excédents pluviométriques.
Particulièrement, cette année 2024 a été exceptionnelle en ce sens qu’au début de la saison, les agriculteurs ont été victime des poches de sécheresses sur l’ensemble de la zone qui se trouve à la lisière du Sahara (nord Ghana, nord Togo, nord bénin nord Nigeria). À ceci s’ajoute, les pluies tardives qui s’observent actuellement en fin de saison agricole alors que les producteurs s’apprêtaient à faire la récolte. Ceci explique en réalité les effets des changements climatiques auxquels le monde rural doit s’adapter. Mais celà tarde encore à venir. Face à leur incapacité, les agriculteurs expriment leur ras-le-bol.« Nous nous débrouillons malgré la cherté des intrants pour produire mais les aléas du changement climatique viennent tout raser sur leur passage…..si ce n’est pas la sécheresse en outrance, c’est les pluies excédentaires» confie Adam kora Aboubakari, producteur de maïs.
À en croire Tamou Ibrahim, agriculteur et éleveur à la fois, les pluies actuelles doivent impérativement cesser en cédant place à un climat propice pour les récoltes. « je me prépare déjà pour faire la récolte mais ces pluies tardives empêchent tout. Ça m’inquiète et nous agriculteurs craignons le pire. C’est notre production qui est en jeu» a-t-il déclaré.
L’inquiétude actuelle des paysans confirme, les prévisions météorologiques annoncées par Météo Bénin au début de la poche de sécheresse observée à l’entame de la saison en cours. En effet, Météo Bénin, en dépit de la poche de sécheresse qu’a connu la saison, avait prévenu qu’il y aurait un léger dépassement de la saison pluvieuse. C’est ce qui se passe actuellement. Seulement que les moyens et approches pour contrer ce dernier reste hypothétiques.
Pour IDANI Mindri, Géographe Climatologue, les producteurs courent un danger imminent avec la continuité des pluies en ces périodes propices des récoltes. «Cette année 2024, les agriculteurs auront un pourrissement des cultures à cause de l’allongement des pluies au cours de la phase de maturité. Il y aura ainsi un pourrissement des grains ou graines, perte de poids, une désappréciation des semences, faible taux d’apport en calorie etc. ce qui risque d’entrainer les famines généralisées». Il ajoute que « Cette fin de saison avec des pluies diluviennes fausses les prévisions des agriculteurs et risque de les amenés à dépendre des marchés périodiques non seulement pour nourrir leur famille mais aussi pour leur semence».
Compte tenu de ces énormes risques, les producteurs ont plus que besoin d’appui solide et de directives précises pour s’adapter aux nouvelles données climatiques. Un accompagnement accru du gouvernement ne viendra que soulager la peine des braves producteurs agricoles.
Entre annonces et soutien aux producteurs, rien de concret!
Des projets et initiatives gouvernementales visant à atténuer les effets des changement climatiques, principalement dans les zones rurales ont vu le jour en cours d’année. Parmi eux, on peut citer le projet « Local Climate Adaptive Living Facility » (Sap032 Local) lancé par José Tonato, ministre de l’environnement, des transports et du Développement Durable le mardi 08 octobre 2024 à Cotonou. Ce projet marque une étape importante dans les efforts du Bénin pour renforcer la résilience climatique à l’échelle locale mais pour l’instant, ces retombés sur les bénéficiaires ne sont pas encore perceptibles sur le terrain. Financé à hauteur de 5,47 milliards FCFA par le Fonds Vert pour le Climat (Gcf) et soutenu par une contribution de 288 millions FCFA du Fonds National pour l’Environnement et le Climat (Fnec), le projet cible 25 communes des départements de l’Alibori, de l’Atacora, de la Donga et du Mono, des zones à forte production agricole…
Le gouvernement a également annoncé à l’issu du conseil des ministres du mercredi 23 octobre 2024, le démarrage d’un projet pilote d’intégration de l’assurance agricole indicielle. Avec l’appui de partenaires techniques et financiers, la phase pilote du projet autorisée pour la période 2024-2025 vise à améliorer la résilience des petits exploitants agricoles face aux effets du changement climatique, notamment les sécheresses et inondations qui compromettent les rendements.
Si on est d’accord qu’il s’agit là d’initiatives louables, il est a remarqué aussi que le gouvernement a manqué d’anticipation au vu des effets que subissent déjà les agriculteurs sur le terrain.
C’est tout de même de l’espoir que suscitent ces annonces au sein du monde agricole.
Moudachirou ALIOU