Production cotonnière : Voici cinq (05) raisons qui justifient la perte de la première place par le Bénin
(Ce qu’il faut faire pour reprendre la couronne)
Après cinq années à régner sur le toit du continent, le Bénin vient de perdre sa couronne de premier pays producteur de coton en Afrique au terme de la campagne 2023-2024. Avec une production de seulement 600.093 tonnes, le pays doit désormais se contenter de la deuxième place derrière le Mali, qui prend la tête du classement avec une production de 690.000 tonnes, selon un rapport établi par le Programme Régional de Production Intégrée du Coton en Afrique (PRPICA). Depuis, tout le monde se demande ce qui peut bien justifier cette régression du Bénin.
Les causes de la chute du champion, Agri Impact en a identifié cinq.
600.093 tonnes en 2023-2024 contre 587.000 tonnes en 2022-2023, il faut déjà remarquer que la production cotonnière a connu une légère hausse de 2% comparée à la campagne écoulée. Mais cela n’a pas suffit pour le maintenir à la première place.
Le Bénin n’est plus champion d’Afrique de l’or blanc, la faute à un Mali qui est revenu en force dans cette filière agricole, le surpassant de près de 100mille tonnes.
Des insectes ravageurs et une pluviométrie capricieuse
Le recul du Bénin ne devrait en réalité surprendre personne. Lors du lancement officiel de la campagne de commercialisation du coton graine au titre de la saison 2023-2024 le vendredi, 10 novembre 2023 à Nikki, le Ministre de l’agriculture annonçait déjà une production de seulement 550.000 tonnes, loin du record absolu de 2021-2022 par exemple, où le pays avait atteint 766.000 tonnes. Pour justifier cette contre performance, Gaston Cossi DOSSOUHOUI a évoqué deux principales raisons. D’abord, une nouvelle espèce de Jasside très agressive qui est apparue sur le cotonnier et à tous les stades de son développement avec à la clé, plusieurs ravages dans les champs. Ensuite, le Ministre a souligné une pluviométrie capricieuse qui a caractérisé la campagne 2023-2024. Deux phénomènes pas des moindres qui ont eu des impacts négatifs sur les rendements.
Le fameux engrais SSP et la regrettable politique du boycott
Il n’y a pas que les raisons d’insectes ravageurs ou de pluviométrie capricieuse qui expliquent le recul constaté, surtout que les autres pays du continent ont été aussi frappés par ces mêmes phénomènes. C’est dire donc qu’en plus de ces deux raisons, il y en a bien d’autres. Comme premier exemple, nous évoquerons le choix du fertilisant SSP, ce fameux engrais qui continue de faire couler beaucoup d’encre et de salive. Il a été maintenu malgré la dénonciation de certains agriculteurs…
Apparu lors de la campagne agricole 2023-2024, cet intrant n’a jamais été maîtrisé par les cotonculteurs et les agriculteurs en général. Et celà s’est payé cash dans les rendements.
Si le Gouvernement tente de s’expliquer en insistant que le SSP reste un engrais de qualité, les agriculteurs eux ne veulent plus en entendre parler.
L’autre cause non négligeable dans cette contre-performance est celle liée à la politique de boycott de la campagne par certains cotonculteurs. Mécontents des différentes mesures prises par le Gouvernement pour encadrer l’exportation des produits tropicaux et encouragés par certains acteurs politiques, plusieurs producteurs de coton ont choisi de ne pas produire l’année dernière pour disent-ils, punir le Président Patrice TALON et son Gouvernement.
Difficile d’avoir des statistiques sur le nombre de cotonculteurs qui ont opté pour ce boycott, mais toujours est-il que celà a visiblement contribué au déclassement du Bénin dans le rapport du PRPICA.
Le réveil du Mali
Ça, personne ne l’a certainement vu venir. Seulement troisième au classement lors de la campagne 2023-2024 avec 390.000 tonnes comme production, le Mali a presque doublé la mise en un an pour se retrouver à 690.000 tonnes. Ceci grâce aux différentes politiques mises en place par le pouvoir de Bamako. Une montée fulgurante qui a eu le mérite de surprendre tous les concurrents du Mali, y compris donc le Bénin. Grand producteur de l’or blanc en Afrique, le Mali n’a fait que reprendre son fauteuil et relancer ainsi la concurrence féroce avec le Bénin.
Cependant, comment le Bénin peut-il reprendre sa place de leader et quel est le défi à relever ?
La zone CFA est le second exportateur mondial de coton. Pour la campagne 2023-2024, la production cotonnière est estimée à 2,6 millions de tonnes dans cette zone monétaire toujours selon les statistiques du Programme Régional de Production Intégrée du Coton en Afrique, contre 2,1 millions de tonnes en 2022-2023, soit une progression nette de 24%. Le Bénin et le Mali mis en ensemble pèsent 58% de cette production. Mais aucun de ces deux pays n’est jamais satisfait de perdre le fauteuil de leader. Deuxième en 2023-2024, le Bénin voudra absolument damer le pion au Mali lors de la campagne 2024-2025 déjà en cours. Mais pour y arriver, il faudra batailler dur et mettre en place une politique efficace. Écouter les cotonculteurs sur les fâcheuses questions d’intrants est primordial, en plus du fait qu’il faut améliorer l’encadrement de ces agriculteurs et renforcer l’assistance aux groupements agricoles. Au-delà de ça, il faut aussi travailler à augmenter le rendement à l’hectare, un domaine où le Cameroun se classe meilleur élève en Afrique. La lutte contre les incendies de coton doit recevoir par ailleurs une attention particulière.
Ce qui pourrait à nouveau renverser la tendance au profit du Bénin
Lors du lancement de la campagne agricole 2024-2025, vendredi 19 avril 2024 à kandi, le gouvernement a pris de fortes mesures pour rehausser la production cotonnière. Au terme de la campagne agricole 2024-2025, si les fruits tiennent la promesse des fleurs, le Bénin devrait pouvoir renouer avec la tendance haussière de la production du coton. Parmi ces mesures le Ministre de l’agriculture Gaston Cossi Dossouhoui a annoncé, la subvention de 24,4 milliards de francs permettant la mise en place à coût subventionné de 123.100 tonnes de NPK, 90.000 tonnes d’Urée et 59.400 tonnes de SSP à raison de 17.000 F le sac de 50 Kg de NPK, 15.000 F le sac de 50 Kg d’urée et 14.000 F le sac de 50 Kg de SSP au producteur. À ceci s’ajoutent, la mise en place d’une subvention de 2 milliards de francs pour faciliter l’accès des producteurs aux semences de qualités, l’acquisition et la mise en place à prix subventionné d’herbicides spécifiques.
Jacques BOSSE & Moudachirou ALIOU